lundi 26 août 2013

Histoire de maladie (et de père)

AAhh, meerrddee. Dire que je voulais écrire des histoires marrantes. Je me la ramène déjà avec le chômage et là, là, je vous le donne droit dans le pif (ou dans le gosier, ça marche aussi...), bon ok, dans le "mille", la maladie.

Et oui, la maladie, mal du siècle, truc qu'on a pas demandé mais qui trouve toujours accès à la porte du premier citoyen malchanceux qu'elle aperçoit. Connasse.

Le malade du jour, c'est mon frère. Il a jamais eu de chance, donc, et ça me fait mal au cœur. Chienne de vie, tu n'épargnes personne. Connasse aussi pour toi.

Ce soir, j'avais envie de me confier sans faire paniquer mon entourage. Première position : ma mère. Aussi paniquée que moi et malade de surcroît, pas la peine de l'emmerder. Mes amis : une bonne amie, Louise, qui a passé la soirée avec moi m'a épaulé mais j'avais besoin de l'épaule "virtuelle" d'un homme. Un homme protecteur. Naturellement, je me mets à écrire un mail à mon père, Monsieur, Homme de sa nature, que je n'ai pas vu depuis l'enterrement de sa mère, ma grand-mère, hein, et à qui je n'ai pas écrit depuis un furtif "bon anniversaire" sur facebook il y a 4 mois... Mon père quoi...
Bref, prise d'un élan de règlement de compte entre mon frère, mon père et moi, je m'y mets (la première...).


"Je t'écris. J'ai peur en fait. Et comme une jeune femme, comme une fille à son père, j'écris. Je ne vais sûrement pas dormir cette nuit. Parce que j'ai peur. Je viens de le dire. Et j'ai l'écriture saccadée mais moins que le comportement de ton fils. Pas parce que l'on est ce que l'on est mais parce qu'il est à l'hôpital. Là, ce soir alors qu'il devait y être ce matin, juste ce matin, jusqu'à cet après-midi, comme tous les mois depuis 2 ans pour son injection de Tysabri.
Ton fils est tombé il y a un mois et une semaine, un soir, le visage le premier sur une table basse qu'il avait dans son salon. Il a fait un malaise vagal et il s'est retrouvé le visage le premier sur cette table, la pommette, a-t-on vu, mais peut-être plus en fait, sur une table qu'il a cassé en deux de tout son poids. Depuis ce soir-là, il a perdu la mémoire immédiate d'abord, incapable de se souvenir des minutes, des heures, des jours qui ont suivi. Et aujourd'hui, il est incapable de se souvenir du 1/4 d'heure qui a précédé.
Il reste à l'hôpital donc. Pour lui, tout va bien, comme d'habitude, enfin, comme il a l'habitude de te le dire. Mais tout ne va pas bien. Il a signé un contrat dans une entreprise qu'il affectionne et sans laquelle il ne pourrait vivre mais il ne s'en souvient pas, il redemandera, dit-il, si vraiment il a signé... Il est aussi incapable de dire qu'il est tombé il y a un mois et une semaine. Pour lui, c'est une semaine tout court.

J'ai peur donc ; toujours. Jusqu'à demain où l'hôpital nous donnera des nouvelles et nous dira comment se sont passés les examens qu'il a passé. À savoir, une nouvelle IRM, une nouvelle ponction lombaire et un examen qui doit dire comment ses influx nerveux se démerdent. J'ai peur bordel. Et quant on a peur, on a besoin de quelqu'un pour nous rassurer, nous épauler, prendre les choses en mains, merde ! Est-ce que ce rôle t'appartient ? Il ne me semble pas. Pardon de t'avoir dérangé. "

Voilà, une lettre à mon père. Comme je sais les faire. Ce qui ressort de cette missive (de ce missile ?!), c'est que j'ai clairement peur. Parce que j'aime mon frère et parce que son corps de merde déconne un max. Une SEP et quoi d'autre encore ? Allez-y, enterrez-le, bande d'encu...

jeudi 22 août 2013

Histoire d'insomnie

Il est 02h15 du matin et je n'arrive pas à dormir.

Deux semaines que mes nuits se ressemblent. Impossible de fermer les yeux avant 4 heures du matin...

J'imagine que ces insomnies sont dues à mes habitudes journalières (devenues obligatoires au réveil quand je tente d'être opérationnelle pour 9 heures et pour toute la journée). Habitudes donc de boire presque un pack de jus d'oranges, deux cafetières italiennes d'un breuvage bien concentré, de fumer un paquet de clopes et de carburer au stress quasi constant du "AHH, je pars une semaine en vacances en septembre mais je n'ai pas travail, ni même l'ombre d'une pige et encore moins d'argent sur mon compte...". Gueuuu, abrégez mes souffrances...

Les journées sont donc aussi pratiquement toutes les même. Recherche d'un emploi sur mes sites favoris : le très célèbre site de référence qui commence par un p et qui se termine par un..  (abrégez leurs souffrances...), c**********.com (ils ont eu la bonne idée de prendre des vacances en août...), a***.fr, e**********.com, i*****.fr.

Vous êtes journaliste ? N'espérez pas trouver le boulot de vos rêves sur la plupart de ces sites (quoique) mais l'appoint fait l'argent et l'argent... et ben l'argent, ça permet de vivre un peu, quand même.

Je suis tombée sur une annonce intéressante sur un de ces sites (je ne citerai pas son nom). Une annonce de 5 lignes qui tente de vendre un poste de journaliste. Ce n'est pas la nature du poste qui pose problème mais le contenu du texte : 9 fautes d'orthographe sur 5 lignes, il faut le faire quand même !

Et pas des fautes de frappe, non, le genre qui te fait envoyer l'annonce au directeur du site en question pour lui signaler les énormités  : "vous aurez en charge la communication, la circulation des savoir entre les personne le publique et c'est bénévole...". Comprenez donc "vous aurez en charge la communication, la circulation des savoirs entre les personnes, le public et ses bénévoles" Je me suis même demandé si c'était l'emploi qui était bénévole.

En attendant, j'ai passé 5 heures à refaire mon CV, je suis repassée par la case annonces, j'ai préparé des sujets à présenter à des rédacteurs en chef et il est 3 heures. Et je ne dors pas. Et je ne peux certainement pas envoyer des candidatures à cette heure. J'ai regardé (écouté plutôt, je regardais les annonces éventuelles) les 5 saisons la série Ally McBeal les deux nuits dernières... Je vais revoir la filmographie de Marilyn. Pas le choix...

mercredi 21 août 2013

Histoire de Mars frit

Dans la continuité alimentaire, je poursuis avec une spécialité totalement farfelue, sans raison spécifique d'être, le deep fried mars. Je m'explique.

Comme je vous le disais dans l'article "Histoire de chocolat" du 19 août, il y a des aliments ou des spécialités que l'on découvre au hasard d'un magasin, d'un site web, d'une discussion entre amis ou d'un repas au restaurant... Le deep fried mars, c'est en cherchant du travail que je suis tombée dessus.

En gros, le magazine pour lequel je postule et à qui je précise que je pars quelques jours à Glasgow me dit (oui, les magazines parlent...) : « il y a tout de même un endroit assez drôle, si vous y allez, à prendre en photo ; un endroit dont je n'ai pas le nom mais où le concept est de ... tout frire. Même les barres chocolatées Mars. » 

Le Mars frit, ça existe : c'est google qui l'a dit 


Je googlise dans la minute : « mars », « Glasgow », « frire », et je tombe donc sur cet étrange concept, typiquement glasvégien.

Alors, voilà, en Écosse, on frit tout :
le mouton, le boudin noir, le poisson. Ils ont dû se dire un jour : « pourquoi ne frirait-ont pas des Mars ? ».

Une pizza = un deep fried Mars


Bon, c'est un concept. Un Mars plafonne déjà, pour une "confiserie", à plus de 450 kilocalories, imaginez la hauteur du plafond du deep fried (c'est de l'appartement haussmannien à ce niveau-là) !

Intéressant tout de même. C'est d'ailleurs pour cette raison que je me suis jetée sur mon clavier pour partager l'information. Si je peux vous donner un conseil : mangez une pizza ou un panini au Nutella si vous raffolez des choses écœurantes, ces deux derniers concepts (oui, aujourd'hui, tout est concept et puis, c'est tendance...) sont moins lourds et moins caloriques !

La recette des deep fried Mars


Comme il faut bien goûter à tout, je me dévouerais bien pour les curieux. Et puis sinon, le plus simple est de frire ses Mars à la maison ! Pour cela, il vous faut :
- une friteuse,
- de l'huile de colza bien propre (pas celle des frites),
- des mars (disons 6),
- des corn flakes émiettés finement,
- 2 tasses de farine,
- 1 bouteille de bière blonde,
- de l'eau (60 ml).

- Mélangez la farine, la bière, l'eau et le sel. Placez les miettes de céréales dans une assiette.
- Enrobez chaque Mars du mélange de farine puis roulez-les dans les miettes.
- Faites chauffer l'huile dans la friteuse (ou dans une marmite) puis plongez les barres de chocolat pendant 2 ou 3 minutes.

lundi 19 août 2013

Histoire de chocolat

Si, comme moi, vous êtes curieux de tout, même de la nourriture, vous vous seriez retrouvé dans la même situation, il y a peu de temps, en découvrant un supermarché à Amsterdam : comme un enfant dans un parc d'attraction. Et comme un parent empêchant son bout de chou de passer devant le stand de barbe-à-papa, une amie m'a interdit l'accès au rayon biscuits !

À mon retour à Paris, je découvre un article sur le web sur les spécialités chocolatées que l'on ne trouve pas en France. Imaginez ma surprise, le bonheur de lire, de voir ces produits alléchants...

Si chez nous, le beurre de cacahuète (ou peanut butter) n'a fait une percée qu'il y a quelques années, chez les anglo-saxons, on en raffole, on en met partout et aussi dans les barres chocolatés : les Snickers, les Twix, les Oréo...

En France, les M&M’s se sont légèrement développés avec les parfums chocolat au lait, avec une cacahuète dedans, du chocolat noir... Et dans le monde, ces célèbres dragées s'offrent un défilé de goûts bien plus tentant : beurre de cacahuète (toujours lui), amande, noix de coco, Bretzel, cannelle...

Rayon Kit-kat, les japonais font fort et la France peut se rhabiller avec ses deux parfums (chocolat et chocolat blanc). Les nippons déclinent la confiserie en milliers d'arômes, tous plus chimiques les uns que les autres. Preuve à l'appui : aloe vera, crème de marron, banane, melon, grenadine...
Je ne peux pas dignement mourir sans avoir goûté à toutes ces saloperies !

dimanche 18 août 2013

Histoire de peur

 J'ai peur de beaucoup de choses. J'ai peur des clowns depuis que j'ai vu quand j'avais 7 ans, cachée derrière le canapé du salon de mes parents, le téléfilm « Ça », inspiré du livre de Stephen King (ridicule certes, mais regardez et vous verrez...). Depuis ma tendre enfance, je vois ce clown dès que je me sens en danger ou angoissée. Je ne supporte pas de voir des clowns ou des personnages outrageusement maquillés et assumant des cheveux rouges. Pire encore quand je vois un film ou apparaît l'acteur qui interprète le clown, Tim Curry. Heureusement que sa carrière ne fut pas longue.

J'ai peur des rats depuis qu'enfant, je suis partie en quête de chatons dans la grange de mon grand-oncle à la campagne et que je suis tombée face à face avec un énorme rat des champs. J'ai même cru jusqu'à récemment m'être fait mordre par ce même animal. Ma mère n'a jamais osé me contredire mais j'ai toujours su, au fond, que je m'étais inventée les crocs de la bestiole dans ma petite main d'enfant. Quoi qu'il en soit, je suis tétanisée lorsque j'ai l'occasion (occasion qui se fait plutôt rare) de déambuler dans une animalerie.

J'ai peur du vide aussi, depuis peu. Je ne sais pas pourquoi mais lorsque je m'identifie à une personne qui fait l'expérience du vide, je suis prise de vertige et mon ventre se soulève. Cette sensation intervient depuis longtemps dans mes rêves ou dans des situations où j'aurais pu tomber.

Aujourd'hui, j'ai peur de ma voisine. Peur qu'elle ait réellement perdu la tête et qu'elle ne s'en prenne à nous, les voisines. Je l'imagine, cachée dans le noir du couloir, armée d'une hache à la Shining, d'un revolver ou d'un couteau et attendant que quelqu'un ne sorte. Elle me fout la trousse cette fille et j'attends impatiemment qu'une aide sociale la prenne en charge. J'ai même noté sur mon téléphone le numéro des comissariats de police de mon arrondissement et le numéro de secours.

Totalement flippée.

mercredi 14 août 2013

Histoire d'addiction

L'eau de coco, à Paris, est devenue une boisson courante. Plus la peine de visiter 15 supermarchés avant de trouver une briquette, elles sont vendues un peu partout.

Au départ, je connaissais l'eau de coco de par sa réputation « peopliste ». Explication : je suis déjà tombée, il y a deux ans, sur des photos de Victoria Machinette, une brique d'eau de coco à la main, des sacs d'emplettes dans l'autre, ou de Rihanna en tenue de sport, vantant les bienfaits de cette boisson dans « je-ne-sais-plus-quel-magazine ». Je ne lis pas de magazines people - seulement Elle dans le genre féminin - soyons clairs.

Lorsqu'une collègue de travail me voit regarder une de ces briquettes dans un supermarché quelconque, elle me vante à son tour le goût, le côté naturel et rafraîchissant de l'eau de coco. J'en prends une. J'ouvre l'opercule et ma première réflexion, sans ménagement, est : « Ça pue ! ». Je sens de nouveau, regarde la date limite de consommation. Aucun problème de ce côté-là. Je goûte, deuxième réflexion des plus vives : « C'est dégue..... ! ». 

Sur ces réactions plutôt négatives, je continue mon déjeuner et je termine la boisson parce que je n'ai pas l'habitude de jeter les aliments, aussi mauvais soient-ils.

Autre déjeuner, autre lieu de ravitaillement. Je m'attarde sur le rayon boissons et suis attirée vers une briquette : de l'eau de coco mais sous une autre marque. Je me dis qu'elle a peut-être un goût différent. J'embarque. Je goûte, ce n'est pas très bon mais c'est déjà mieux.

Et voilà, prise au piège. 

Vous connaissez l'accoutumance ? C'est un processus d'adaptation de l'organisme à un stimulus extérieur, un environnement nouveau ou même un produit toxique. Comme avec la cigarette, l'alcool, le sucre ou même une (ou des) personne(s).

Je n'ai pas peur de le dire : je suis addict ! À une boisson qui, pourtant, est : sans alcool, sans sucre, sans colorants, ni conservateurs... Mais chère. 2,30 les 33cl !

On se demande pourquoi j'écris sur ce sujet... L'eau de coco donne une énergie incroyable. Je travaille 15 heures par jour sans café, ni Guronsan, tout en étant on ne peut plus concentrée.

Ceci s'appelle un placebo. Je confère à l'eau de coco le pouvoir que m'aurait apporté autre chose. Ça relève de la psychologie !

Je ne monte pas de propagande. Ne buvez pas d'eau de coco, vous vous ruineriez... Et n'arriveriez pas à dormir.^^

samedi 10 août 2013

Histoire de poubelle(s)

Dans mon immeuble, on ne se connait pas. On se croise, on se dit bonjour poliment mais on ne va pas boire l'apéro les uns chez les autres.

L'autre jour, je reviens chez moi en début de soirée et au lieu de croiser un quelconque voisin dans la cage d'escalier, je croise une policière, en uniforme. Bizarre, me dis-je. Je lui demande s'il y a un problème et elle me répond, très professionnelle : « Pour l'instant, non, mais nous enquêtons... ».

Oh... bordel. Je monte jusqu'à mon étage d'où me parviennent des voix mais une fois arrivée à mon étage, personne. Ouf, ce n'est pas chez moi. Mai quelques minutes plus tard, j'entends de nouveau des voix provenant de chez ma voisine. Un policier et la-dite voisine sortent (oui, les murs de mon immeuble ne font pas plus de 3 mm d'épaisseur et on entend tout... absolument tout !).

Je les écoute et il apparaît que la jeune femme d'à côté les a appelé car il y a une odeur étrange (entendez insupportable) depuis un mois à notre étage. Il est vrai que se dégage une odeur de sac poubelle contenant des crevettes (à mon avis) depuis quelque temps et assez terrible à supporter. Par élimination, elle a jugé qu'il s'agissait de la porte qui se situe devant l’ascenseur (pas la mienne, bien sûr). Mais personne ne répond à cette porte... Heinhein... S'agit-il d'un cadavre en pleine putréfaction ?

Les flics tambourinent à la porte, pas de réponse. Ils demandent à une autre voisine, située à côté de cette porte pour voir si, de sa fenêtre, on peut atteindre celle de la personne qui ne répond pas. Et à ce moment-là, le cadavre, enfin la personne qui aurait dû être mal en point, ouvre sa porte.

Bon, alors, le flic se met à crier, lui demande pourquoi elle ne répondait pas à l'instant et « qu'est-ce-que c'est que cette odeur chez vous ? ». Il lui explique en rouspétant encore qu'il doit faire son métier et entrer chez elle pour voir s'il n'y a pas un cadavre parce que « ça sent le mort là mademoiselle ! Non, mais vous ne sentez pas ? ». Elle proteste deux secondes et le laisse entrer.

On entend crier encore le flic que c'est dégueulasse, que mais « comment vous faites pour vivre dans cette porcherie ? ». Il entre dans les toilettes et en ressort immédiatement et part dans la cage d'escalier pour vomir. Il nous décrit ensuite qu'il y a au moins 50 centimètres de merde dans la cuvette et partout autour... Sans compter la nourriture pourrie partout dans l'appartement. 

La fille referme sa porte lorsque le flic lui demande de le suivre. Elle met au moins 20 minutes à rouvrir (la honte, la folie ?) et le flic essaye même de défoncer la porte comme dans les films américains. Mais soyons sérieux, il n'a jamais fait ça de sa vie et se fait plus mal qu'autre chose. Nous, on rigole avec les autres voisines... Après un pourparlers derrière la porte, elle ouvre pour récupérer les papiers d'identité qu'elle a donné juste avant au mec en uniforme et referme aussitôt.

Le flic nous dit qu'il faut nous signions une pétition et la faire parvenir au syndic parce que sinon, d'ici un mois encore, on va avoir des cafards à notre étage (déjà, qu'il y a des mouches à merde...). Et comme dit ma mère, la voix de la sagesse, « si elle est capable de se mettre en danger comme cela, il se peut aussi qu'elle allume le gaz cette jeune fille ». Merci, maman, ce soir, je ne dors pas chez moi.

samedi 3 août 2013

Histoire de vin(s)

 Faire la tournée des bars, c'est toujours prometteur. Faire la tournée des bars, c'est sympa. Faire la tournée des bars, c'est se mettre en marge des after-workers qui restent sur place, dans UN bar. Mais faire la tournée des bars, c'est surtout dangereux.

Le genre de chose que l'on commence généralement à une heure appropriée. Genre, après le travail. Comme des gens normaux qui ont un travail normal et des horaires de travail normaux. Mais lorsque l'on est pigiste en galère (et sans argent), on commence toujours plus tôt...

Et on commence toujours à l'happy hour, à 16h, parce qu'à Paris, il y a toujours des bars (d'ivrognes) qui commencent leur happy hour à 16h. Au départ, on commande une pinte avec la (les) copine(s) parce que c'est pas cher (attends 3 (6) euros la bière, c'est royal!). 

Puis, vient le vin...

Et on boit tous les bons vins de tous les bars que l'on arpente, qu'ils soient bio (au départ, c'est toujours mieux : « tu sais, j'ai des migraines horribles, je préfère le vin nature, sans sulfate ») et à la fin, tu bois n'importe quel verre que l'on te tend, le temps que c'est une boisson alcoolisée et que ça accompagne la discussion et ta trentième cigarette.

Résultat, à 20h, en plein cagnard, encore (tu crois), t'es bourrée et tu vois les gens qui sortent du travail pour LEUR happy hour. Comme il y a toujours un ou deux mecs mignons dans le lot (parce que c'est bien connu, en été, tous les hommes sont beaux, surtout derrière tes yeux vitreux de fille déjà bien allumée), tu restes et tu bois encore quelques (10) verres "juste pour dire".

Mais dire, tu n'en ai pas capable. L'alcool te rend dyslexique et tu es même incapable de formuler ce mot barbare pour te justifier « non, mais quand je bois un peu, je deviens dylesquique (sérieux, c'était quoi leur problème aux gens qui ont inventé ce mot ??). Tu es ridicule, tu allumes une quarantième cigarette pour te donner une consistance, ça te tourne la tête et tu essaies péniblement de te diriger vers les toilettes en titubant pour te cacher.

Mais tu restes deux plombes aux toilettes à force de te tenir aux murs des wc parce que, NON, tu ne poseras pas ton derrière sur des toilettes où n'importe qui a fait n'importe quoi (il est 22h...) et quand tu reviens, tes amis ne sont plus là parce qu'ils sont aussi bourrés que toi et qu'ils ont eu envie de se coucher.

Tu as envie de te cacher, de mettre une cape d'invisibilité ou de mourir foudroyée, là, sur place. Enfin, tu te diriges vers le bar pour payer quand même parce que tu es pauvre mais tu vas revenir alors autant ne pas se faire d'ennemis. Ils ont payé, tant mieux, tu te barres à la vitesse de l'escargot blessé qui zigzag (et zig et zag).

Tu rentres chez toi comme tu peux et tu es contente parce que tu sens que demain, tu n'auras pas la gueule de bois puisque tu as bu du vin bio. Il est 23h.

Au réveil, un marteau piqueur tremble dans ton crâne. Et ce n'est pas les voisins...

Histoire de guerre

Ce témoignage m'a bouleversé. La lettre d'une journaliste en plein cœur de la guerre. Le genre de texte qui vous fait réfléchir sur votre petit confort.

Ce texte sur son expérience syrienne a été publié le 1er juillet 2013, sur le site de la 'Columbia Journalism Review', par Francesca Borri, journaliste indépendante italienne, auteur d'un livre sur le Kosovo et d'un autre sur les rapports entre Israéliens et Palestiniens intitulé 'Quelqu'un avec qui parler' (Manifestolibri, 2010).

Il m’a finalement écrit. Voilà plus d’un an que je lui envoie des articles à la pige. Pour lui, j’ai attrapé la typhoïde et reçu une balle dans le genou. Aujourd’hui, mon rédacteur en chef a regardé les infos et a pensé que je faisais partie des journalistes italiens qui ont été kidnappés. Il m’a envoyé un e-mail: «Si tu trouvais une connexion, pourrais-tu tweeter ta captivité ?»

Le même jour, dans la soirée, j’ai retrouvé le camp rebelle où je vivais, au beau milieu de cet enfer qui s’appelle Alep, et dans la poussière et la faim et la peur, j’ai espéré trouver un ami, un mot compatissant, un geste tendre. Au lieu de ça, je n’ai trouvé qu’un autre e-mail de Clara, qui passe ses vacances chez moi en Italie. Elle m’a déjà envoyé huit messages «Urgents !». Aujourd’hui elle cherche ma carte de spa, pour se faire masser gratuitement. Les autres messages dans ma boîte de réception ressemblaient à ça: «Excellent, ton article aujourd’hui ; aussi excellent que ton livre sur l’Irak.» Malheureusement, mon livre ne parlait pas de l’Irak, mais du Kosovo.

Du reporter freelance, les gens gardent l’image romantique d’un journaliste qui a préféré la liberté de traiter les sujets qui lui plaisent à la certitude d’un salaire régulier. Mais nous ne sommes pas libres, bien au contraire. Rester en Syrie, là où personne ne veut rester, est ma seule chance d’avoir du boulot. Je ne parle pas même d’Alep, pour être précise. Je parle de la ligne de front. Parce que les rédacteurs en chef, en Italie, ne veulent que le sang et les «bang bang» des fusils d’assaut. J’écris à propos des groupes islamistes et des services sociaux qu’ils mettent à la disposition des populations, les racines de leur pouvoir – une enquête beaucoup plus complexe à mener que le traditionnel article en direct du front. Je fais tout mon possible pour expliquer, et pas seulement pour émouvoir, et je me vois répondre: «Qu’est-ce que c’est que ça ? Six mille mots et personne ne meurt ?»

A vrai dire, j’aurais dû comprendre ça la fois où mon rédacteur en chef m’a demandé un article sur Gaza, parce que Gaza, comme d’habitude, était bombardé. J’ai reçu cet e-mail: «Tu connais Gaza par cœur», écrivait-il. «Quelle importance, que tu sois à Alep ?» Exactement. La vérité est que j’ai fini en Syrie parce que j’avais vu dans «Time» les photos d’Alessio Romenzi, qui est entré dans Homs par les égouts quand personne ne savait ce qu’était Homs. J’ai regardé ses clichés en écoutant Radiohead – ces yeux, qui me fixaient ; les yeux de ces gens en train de se faire massacrer par l’armée d’Assad, un par un, et personne n’avait même entendu parler d’un endroit nommé Homs. La conscience broyée comme par un étau, je n’ai pas eu d’autre choix que de partir en Syrie.

Mais que vous écriviez d’Alep ou de Gaza ou de Rome, les rédacteurs en chef ne voient pas la différence. Vous êtes payé pareil: 70$ par article. Même dans des endroits comme la Syrie, où la spéculation délirante fait tripler les prix. Donc, par exemple, dormir dans une base rebelle, sous les obus de mortier, sur un matelas posé à même le sol, avec cette eau jaune qui m’a donné la typhoïde, coûte 50$ par nuit ; une voiture coûte 250$ par jour.

Donc, plutôt que de minimiser les risques, vous finissez par les maximiser. Non seulement vous ne pouvez pas vous payer une assurance – presque 1000$ par mois – mais vous ne pouvez pas non plus payer un fixeur ou un traducteur. Vous vous retrouvez seul en terre inconnue. Les rédacteurs en chef sont bien conscients que rémunérer un article 70$ vous pousse à économiser sur tout. Ils savent aussi que si vous êtes sérieusement blessé, une partie de vous espère ne pas survivre, parce que vos finances ne vous permettent pas d’être blessé. Mais ils achètent l’article, même quand ils refuseraient d’acheter un ballon de foot Nike fabriqué par des enfants pakistanais.

Les nouvelles technologies nous amènent à penser que la vitesse est un élément de l’information. Mais ce raisonnement repose sur une logique autodestructrice: le contenu, désormais, est standardisé, et votre journal, votre magazine, n’a plus aucune singularité, et il n’y a donc plus aucune raison de payer un reporter. Pour les nouvelles, j’ai Internet – gratuitement. La crise que les médias traversent est une crise du média lui-même, pas du lectorat. Les lecteurs sont toujours là, et contrairement à ce que croient beaucoup de rédacteurs en chef, ce sont des gens intelligents qui demandent de la simplicité sans simplification. Ils veulent comprendre, pas uniquement savoir.

Chaque fois que je publie un témoignage de guerre, je reçois une douzaine d’e-mails de personnes qui me disent : «Ok, bel article, tableau saisissant, mais je voudrais comprendre ce qu’il se passe en Syrie.» Et j’aimerais tellement répondre que je ne peux pas proposer d’articles d’analyse, parce que les rédactions vont simplement le survoler et me dire: «Tu te prends pour qui, gamine ?» - malgré mes trois diplômes, mes deux livres et mes dix années passées à couvrir des guerres, d’abord comme enquêtrice humanitaire puis comme journaliste. Ma jeunesse, au passage, s’est volatilisée quand des morceaux de cervelle m’ont éclaboussée. C’était en Bosnie. J’avais 23 ans.

Les journalistes freelance sont des journalistes de seconde zone – même s’il n’y a que des freelance ici, en Syrie, parce que c’est une guerre sale, une guerre du siècle dernier ; c’est une guerre de tranchée entre des rebelles et des loyalistes qui sont si proches qu’ils se hurlent dessus pendant qu’ils se mitraillent. Quand vous découvrez la ligne de front, vous n’en revenez pas, avec ces baïonnettes que vous n’avez jamais vues que dans les livres d’histoire. Les guerres modernes sont des guerres de drones, mais ici ils combattent mètre par mètre, rue par rue, et on en chie de peur.

Et pourtant les rédacteurs en chef, en Italie, vous traitent comme un enfant ; vous prenez une photo hallucinante, et ils vous disent que vous avez été chanceux, au bon moment au bon endroit. Vous décrochez une exclusivité, comme l’article que j’ai écrit un septembre dernier sur la vieille ville d’Alep, classée au patrimoine de l’UNESCO, réduite en cendres tandis que les rebelles et l’armée syrienne se disputaient son contrôle. J’ai été la première reporter étrangère à y pénétrer, et les rédacteurs en chef vous lancent: «Comment pourrai-je justifier que mon journaliste n’ait pas pu entrer et que vous y êtes parvenue ?» J’ai reçu un e-mail d’un chef de service à propos de cet article : «Je le prends, mais je le publierai sous le nom de mon journaliste.»

Et puis, bien sûr, je suis une femme. Un soir, récemment, il y avait des tirs de mortier partout et j’étais assise dans un coin, avec la seule expression qu’on peut avoir sur le visage quand la mort risque de frapper d’une seconde à l’autre, et un autre reporter arrive, me regarde de la tête aux pieds, et me dit: «Ce n’est pas un endroit pour une femme.» Que pouvez-vous répondre à un type comme ça ? Crétin, ce n’est un endroit pour personne.

Si je suis effrayée, c’est parce que je suis lucide. Parce qu’Alep n’est que poudre à canon et testostérone et que tout le monde est traumatisé: Henri, qui ne parle que de guerre ; Ryan, bourré d’amphétamines. Et pourtant, à chaque fois que nous voyons un enfant taillé en pièces, c’est d’abord vers moi, la femme «fragile», qu’ils se tournent, pour savoir comment je me sens. Et je suis tentée de leur répondre : je me sens comme vous. Et les soirs où j’ai l’air blessée, ce sont les soirs où je me protège, où j’évacue toute émotion et tout sentiment ; ce sont les soirs où je m’épargne.

Parce que la Syrie n’est plus la Syrie. C’est un asile de fous. Il y a cet Italien qui était au chômage et qui a rejoint al-Qaeda, dont la mère sillonne Alep pour le retrouver et lui mettre une bonne raclée ; il y a le touriste japonais qui arpente les lignes de front parce qu’il dit avoir besoin de deux semaines de «sensations fortes» ; le Suédois diplômé d’une école de droit qui est venu pour rassembler des preuves de crimes de guerre ; les musiciens américains qui portent la barbe à la Ben Laden, prétendant que ça les aide à se fondre dans le décor alors qu’ils sont blonds et qu’ils mesurent plus d’un mètre quatre-vingt-dix. (Ils ont apporté des médicaments contre la malaria, même s’il n’y a pas de cas de malaria ici, et veulent les distribuer en jouant du violon). Il y a les membres de diverses agences des Nations-Unies qui, lorsque vous leur dites que vous connaissez un enfant souffrant de leishmaniose (une maladie transmise par piqûre d’insecte) et que vous leur demandez s’ils pourraient aider les parents à le faire soigner en Turquie, vous répondent qu’ils ne le peuvent pas parce que c’est un cas particulier et qu’ils ne s’occupent que de «l’enfance» en général.

Mais nous sommes des reporters de guerre après tout, n’est-ce pas ? Une bande de frères (et de sœurs). Nous risquons nos vies pour donner une voix à ceux qui n’en ont pas. Nous avons vu des choses que la plupart des gens ne verront jamais. Nous sommes parfaits pour animer les dîners en ville. Les bons clients que tout le monde veut inviter.

Mais le secret sordide, c’est qu’au lieu d’être unis, nous sommes nos propres pires ennemis ; et la raison du papier payé 70$, ce n’est pas le manque d’argent, parce qu’il y a toujours de l’argent pour un papier sur les petites amies de Berlusconi. La vraie raison, c’est que quand vous demandez 100$, quelqu’un d’autre est prêt à le faire pour 70. C’est une compétition féroce. Comme Beatriz, qui aujourd’hui m’a indiqué une direction erronée pour pouvoir être la seule à couvrir une manifestation, tromperie qui m’a menée au milieu des snipers. Juste pour couvrir une manifestation, semblable à des centaines d’autres.

Pourtant nous prétendons être ici afin que personne ne puisse dire : «Mais nous ne savions pas ce qui se passait en Syrie.» Alors que nous ne sommes ici que pour emporter un prix, pour gagner en visibilité. Nous sommes ici à nous mettre des bâtons dans les roues comme si un prix Pulitzer était à notre portée alors qu’il n’existe absolument rien de ce genre. Nous sommes coincés entre un gouvernement qui ne vous accorde un visa que si vous êtes contre les rebelles et les rebelles qui, si vous êtes avec eux, ne vous autorise à voir que ce qu’ils veulent bien vous montrer.

La vérité, c’est que nous sommes des ratés. Deux ans que ça dure et nos lecteurs se rappellent à peine où se situe Damas, le monde entier qualifie ce qui se passe en Syrie de «pagaille» parce que personne ne comprend rien à la Syrie – hormis le sang, encore le sang, toujours le sang. Et c’est pour cette raison que les Syriens ne nous supportent plus maintenant. Parce que nous montrons au monde entier des photos comme celle de cet enfant de sept ans avec une cigarette et une kalachnikov. Il est clair que cette photo est une mise en scène mais elle a été publiée dans les journaux et sur les sites web du monde entier en mars et tout le monde criait: «Ces Syriens, ces Arabes, quels barbares !»

Lorsque je suis arrivée ici la première fois, les Syriens venaient vers moi et me disaient: «Merci de montrer au monde les crimes du gouvernement.» Aujourd’hui, un homme est venu vers moi ; il m’a dit: «Honte à vous.»

Si j’avais réellement compris quelque chose à la guerre, je n’aurais pas essayé d’écrire sur les rebelles et les loyalistes, les sunnites et les chiites. Parce que la seule histoire qui vaille d’être racontée en temps de guerre, c’est comment vivre sans peur. Tout peut basculer en une fraction de seconde. Si j’avais su cela, alors je n’aurais pas eu si peur d’aimer, d’oser, dans ma vie ; au lieu d’être ici, maintenant, recroquevillée dans l’obscurité et la puanteur, en regrettant désespérément tout ce que je n’ai pas fait, tout ce que je n’ai pas dit. Vous qui demain serez encore en vie, qu’attendez-vous ? Pourquoi hésitez-vous à aimer ? Vous qui avez tout, pourquoi avez-vous si peur ?

Francesca Borri
Traduit de l'anglais par Véronique Cassarin-Grand et David Caviglioli
Avec l'autorisation de la 'Columbia Journalism Review'

jeudi 1 août 2013

Histoire d'un Prétendant et d'un Moineau

 Journée caniculaire. Comme ça fait un mois (enfin!) que ça dure, je me suis octroyée une pause terrasse-journal-Elle-café pendant 3 heures ce matin (parce que je suis pigiste et que travailler à la maison, c'est plutôt sympa des fois), puis de rien-foutre, de pure-glandouille-devant-le-ventilo-à-la-maison (studio de 25 m2...), le reste de la journée.

J'aurais pu rester dehors, le soleil est mon ami, mais j'envisage très sérieusement d'arrêter de parfaire mon bronzage de coureuse du Tour de France (marques de bronzage s'arrêtant au dessus de la cuisse). Oui, car je ne quitte plus mon mini-short depuis la mi-juillet, période de fin (happy ending !) d'un contrat dans une vraie entreprise où l'habit décontracté était prohibé.

Et j'ai surtout passé la journée, au lieu de travailler donc, à penser à mon plan de rupture lâche-puéril-par-sms-entendez... Oui, parce qu'il m'arrive de courir après des hommes (sans succès) et de me faire courser par d'autres comme ce Moineau qui va recevoir un message dont il va se rappeler... Il faut d'ailleurs que je regarde sur les forums d'internet comment bloquer un numéro pour ne plus recevoir ses appels et ses sms...

Quelle horreur de passer pour la méchante alors qu'en général, tout le temps même, ce sont les hommes qui ont ma peau (et mon cœur, et mon esprit et mon ventre qui monte et qui monte jusqu'à me donner la nausée).

Salauds ! Non, ce gentil Moineau ne paie pas pour les autres (quoique, je me demande). Parce qu'il y a une autre histoire, pas encore classée et juste derrière cet Oisillon, à une semaine près. Celle d'un Prétendant aux titres de baisers-inventifs, sûrement-dieu-du-sexe et enfin, dans un futur très proche, père-de-mes-enfants (je ne m'emballe absolument jamais).

Un camarade de bureau qui avait l'air timide mais qui, dès qu'il posait ses yeux sur moi, prenait un regard profondément déterminé (et assurément sexy). La timide que je suis (aussi) n'a pas eu le cran de lui parler pendant les pauses cigarettes (qui se sont faites rares au départ car j'essayais d'arrêter de fumer), les after-work où je n'ai pas pu aller. Bref, dernier jour, à 18h, je quittais les lieux, à 18h01, le Prétendant recevait un mail de ma part.

Pendant les quatre jours suivants, pas de réponse.
Sur les conseils avisés d'amis masculins lors de soirées un peu (x100) arrosées, je lui ai renvoyé un mail "ni-vu-ni-connu-je-n'ai-jamais-envoyé-le-premier-ceci-est-un-mail-d'approche-tout-à-fait-innocent" :
« Salut Prétendant,
Je regrette de ne pas avoir pu te connaître au travail.
Que dirais-tu de boire un verre bientôt ?
Emma »

Un jour passe...
Désespérée, je bois à ne plus savoir où j'habite et je me couche avec une petite idée de la gueule de bois du lendemain.

Le matin, réveillée par le chant de ces foutus piafs et par le marteau-piqueur dans ma tête, je regarde mon téléphone, rayon internet, directement vers la messagerie. Là, la machine m'annonce, avec un soleil en fond (la seule fois où le soleil n'est pas toujours mon ami) « Vous n'avez aucun message, profitez de votre journée ! ». La tête douloureuse dans l'oreiller, je fixe l'écran de mon stupide téléphone quand soudain, un nouveau message apparaît. C'est le Prétendant !

« En effet, nous n'avons pas eu l'occasion de parler.
Tu veux boire un verre ce soir ou demain ?
Prétendant.
Numéro du Prétendant et mail du Prétendant »

Je saute du lit (aïe, ma tête), appelle et texte mon répertoire pour annoncer la nouvelle à la terre entière. Tout le monde est content.
Je suis maintenant hautement stressée du domaine de l'anxiété x10 000.
Parce que ce sera ce soir. Il faut donc que je me débarrasse de ma gueule de bois et que je récupère forme humaine...

Le soleil fait son tour du cadran et nous voici arrivé au soir. LE soir.
Je passe la moitié de la journée au soleil pour parfaire mon bronzage (pas encore de coureuse du Tour de France), l'autre moitié dans la salle de bain et un tiers de la journée dans une parfumerie pour me racheter mon parfum porte-bonheur, que j'appelle l'"Eau d'Amour" avec un découvert qui pointe déjà son nez...
Je suis armée telle une guerrière et fonce lire en livre en terrasse en l'attendant, très nonchalamment, l'air de rien...

Lorsqu'il arrive, je suis en pleine discussion avec un croulant qui s'intéresse à ma lecture (je portais pourtant l'uniforme de la fille qui ne veut pas qu'on lui parle, enfin, pas avant que Prétendant arrive), c'est-à-dire lunettes de soleil, écouteurs et yeux fixés sur ma lecture).

La place du Prétendant récupérée, nous commençons à parler du travail (c'est à cause de ça que ça a foiré, presque sûre), puis de la famille (ou à cause de ça), puis de la santé (cherchez plus, c'est ça), puis des livres, du cinéma, de nos envies dans la vie, de nos points faibles... et forts. Bon, je ne sais pas trop ou ça a déconné mais il s'avère qu'à 01h30 du matin, nous partons pour rentrer chacun de notre côté (parce qu'il travaille, lui, le lendemain), il va pour me faire la bise, je lui dit que non et l'embrasse comme une tigresse. Baiser auquel il répond avec autant de fougue, me semble t-il.

Ses dernières phrases sont : « T'es une terrible, toi ! », « T'es belle », « On ne va pas s'arrêter sur ce baiser ? ». À cette dernière réplique, je me dit que je ne coucherais pas, comme d'habitude le premier soir, et que, en tant que baisers-inventifs, sûrement-dieu-du-sexe et enfin, dans un futur très proche, père-de-mes-enfants, je lui doit, je nous doit, je dois à nos futurs enfants de ne pas céder ce soir ! Je lui demande donc ce qu'il fait ce week-end et si nous pouvons nous revoir à ce moment-là... Il me dit oui et nous repartons chacun chez soin, moi des cœurs dans les yeux et son nom déjà accolé à mon prénom.

Pas d'appel(s), pas de message(s). Ni le jour suivant, ni le lendemain, ni le surlendemain, ni le week-end, ni la semaine suivante ni le week-end d'après !
Voilà ce qui s'appelle « faire le mort ». Il croyait me faire le coup du : Je n'existe pas. Je suis un mirage, je suis une invention de ton esprit (j'ai même demander à des anciens collègues s'il existait vraiment). J'aurais pu essayer de l'imiter et utiliser la résilience pour oublier qu'il existe mais c'est mal me connaître.

Parce que j'ai attendu le vendredi soir pour lui proposer une rencontre (nous nous étions vus le mercredi). Sans réponse, donc. J'ai réitéré ma demande le samedi soir, puis le dimanche matin, sans réponse toujours. Enfin, au comble du désespoir, j'ai tenté un message désespéré le dimanche soir et le lundi, après une soirée alcoolisée (x10 000).

Une semaine plus tard, je voyais Moineau. Gentil, gentleman, cultivé mais bouc-émissaire, je l'avoue.

Histoire de ruptures

Le plan de rupture lâche-puéril-par-sms-entendez est amorcé. Il ne me reste plus qu'à envoyer LE sms (rien qu'en l'écrivant, je me trouve pitoyable).

J'y ai pensé toute la nuit et ai vu des ombres, entendu des bruits (un spectre se promènerait-il dans mon appartement ?), fermé tout à double tour, même les fenêtres par 35°C. Résultat, j'ai failli étouffé pendant un semi-sommeil ponctué de rêves ou Moineau défonçait la fenêtre à coups de pied-de-biche et me réglait mon compte à l'arme blanche. Je lis trop l'actualité, je lis trop les faits divers, je regarde trop de films violents... Et je suis surtout toujours trop égocentrique d'imaginer que ce jeune homme va me poursuivre. Parce qu'en aucun cas, il va me harceler de coups de téléphone et de messages pour me demander "Pourquoi ?".

Je suis prête mais j'attends le bon moment pour lancer le missile. Je vais attendre d'aller à la piscine, (parce qu'en plus de jouer à la coureuse du Tour de France, je vais aussi quelquefois me tremper dans l'eau (très rarement en fait puisque je suis allergique au chlore et qu'une longueur de brasse me donne des palpitations et des crampes aux orteils et le souffle court...) comme ça, j'aurais une heure de répit avant de voir, la main tremblante, s'il a éventuellement mal pris la nouvelle.

Lorsque je suis amoureuse, je redevient ado, en mode j'ai-14-ans-j'ai-des-couettes et lorsque j'arrête une relation, aussi longue soit-elle (celle-là a duré à peine 4 jours et ne croyez pas que cela m'arrive tous les quatre matins !), je redevient AUSSI ado, en-mode-j'ai-14-ans-j'ai-des-couettes.

En fait, il n'y a que lorsque l'on rompt avec moi que je me transforme en vraie adulte. Car il faut réfléchir à la situation qui n'est plus, redéfinir ce qu'est une relation saine, ne pas faire les mêmes erreurs que dans le passé (ahah...), penser en adulte, comme je le disais. Et s'enfermer chez soi en pyjama, regarder toute la filmographie de Woody Allen (ou de John Cassavetes (ou reprendre à la saison 1, épisode 1 la série Sex and the City...)), manger ce que vous n'avez pas touché depuis un an dans le placard et dans le congél' (parce qu'il est hors de question de sortir de votre tanière dans cet état), boire comme un trou avec des amis réconfortants, relire vingt fois les sms de l'enfoiré en question et envoyer vingt sms à ledit enfoiré parce qu'on oublie toujours de lui dire quelque chose et que, c'est bien connu, il y a plus de chances qu'il revienne en l'assommant de messages suppliants, puis énervés, puis rigolos (selon vous), puis terre à terre (toujours selon vous). Bref, je me transforme en vraie adulte.

Bon, piscine annulée (pas par moi pour une fois) et message envoyé...
Téléphone éteint pendant au moins 5h.